CELUI QUI DISAIT NON d'Adeline Baldacchino

CELUI QUI DISAIT NON  d'Adeline Baldacchino
Aux Editions FAYARD - 272 pages

Quand August et Irma comprennent que la politique rattrape toujours ceux qui s’en défendent, il est déjà trop tard pour survivre, mais encore temps de mourir libres.

Le 13 juin 1936, un homme perdu dans la foule, sur le quai d’un chantier naval de Hambourg, refuse de saluer Hitler.

Le 28 avril 1942, une femme fait partie du premier convoi des gazées de Ravensbrück. Ou comment une histoire d’amour devient une histoire d’insoumission.

Ce roman est leur tombeau, dédié aux vivants qui voudraient se souvenir de l’avenir.



MON AVIS

Parfois l'Histoire produit des héros malgré eux, souvent anonyme, comme ce manifestant de la Place Tian'anmen, debout si petit face à un char. August Landmesser, ne le restera pas photographié seul, bras croisés pour entrée dans l'histoire. J'espère que les filles d'Irma et August auront pu lire ce magnifique roman.

Rarement un roman m'a autant bouleversée ! 

"Et si c'était à refaire, je referai ce chemin
La voix qui monte des fers, dit je le ferai demain..."

Ces vers de Louis Aragon me sont venus à la lecture de l'histoire d'August, telle que l'a reconstitué Adeline Badacchino.

Adeline Badacchino frappée par cette photo vue sur le net, qui montre August Landmesser, bras croisés, en juin 1936 à Hambourg, refusant de saluer Hitler au milieu d'une foule d'hommes, bras levés formant le salut nazi. 

L'auteure en fait le point de départ d'une quête personnelle pour comprendre une époque, raconter à son père l'amour fou d'August et Irma, cueillir en passant une part de son histoire familiale. Entre fiction et réalité devenue historique.

Est-ce cela l'héroïsme ? "Hâtes-toi de transmettre ta part de merveilleux de rébellion de bienfaisance." René Char.

L'auteure cite ce vers. Comme elle a raison :  August Landmesser nous a transmis sa part de courage resté dans l'Histoire, son visage lumineux d'amoureux rebelle face à l'innommable fureur d'un homme.

Ce roman est un phare pour que l'ignorance ne soit plus de mise. Demain, encore de simples citoyens se mueront en bourreaux ordinaires, si nous ne sommes pas vigilants. L'Amour ne résout pas tout.

Leur amour au-delà de toutes les règles édictées par un fou moustachu n'a pas empêché le pire... Irma, August, vous n'avez pas résisté en vain : deux vies sont nées de votre amour. Deux vies pour se souvenir de l'indicible courage qu'il vous a fallu, pour aimer par-dessus tout, malgré tout.

Jamais, je n'entendrai plus la phrase "c'est politique" sans réagir désormais. Grâce à cet homme surgit du passé, lumineux et seul au coeur d'une mêlée de bras levé, pour dire que NON ce n'est pas possible, pour toutes les Irma de la terre. Il faut s'élever, il faut se lever !

Ces hommes ordinaires devenus bourreaux ordinaires ont cru à une politique, ont assassinés par milliers des hommes, femmes, enfants au mépris de toute humanité, parce qu'une politique le leur avait commandé.

Les mots justes, factuels, poétiques de l'auteure n'enlèvent rien à la cruauté de leur destin, à la beauté de la petite histoire d'Irma et August, devenue part de la grande Histoire. Indissociable du chant des mésanges, de ce qui reste de beau, d'irremplaçable toujours : l'Amour absolu, absurde puisqu'il coûte des vies mais total, unique rempart face à la barbarie.

Voici le roman de la sélection des 68 qui restera dans ma mémoire, pour la dureté de la réalité qu'il met en lumière, pour la grandeur de l'Amour qu'il nous donne à voir. MERCI pour ce moment de lecture incroyable, qui touche au coeur, Madame Adeline Baldacchino !









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