L'ENFANT MOUCHE
Auteur : Philippe Pollet-Villard
Editeur : J'ai Lu
1944. La vie d’Anne-Angèle bascule lorsqu’elle accepte de prendre en charge Marie, une orpheline aux origines troubles. Ensemble, elles doivent quitter la capitale pour s’installer dans un village de province où elles se heurtent aussitôt à l’hostilité des habitants.
Portrait d’une orpheline sous l’Occupation, L’enfant-mouche brosse un tableau sans complaisance et pourtant teinté d’humour de la vie d’un village pendant la guerre : un quotidien de combines, de bassesses et de violences répondant aux seuls impératifs de la survie.
Mon avis :
L'histoire pourrait être d'une tristesse absolue tant Marie
apprend à vivre avec des personnages peu aimables, recommandables, ou la
violence est omniprésente. Pourtant, son portrait est incroyable de vitalité
dans le marasme de l’époque.
1944, une effeuilleuse de cabaret passe un contrat avec une infirmière
Anne-Angèle, revenue des colonies à Paris pour visiter sa soeur mourante.
Quelques deniers, la voilà qui persuade Anne-Angèle de prendre soin de Marie,
une orpheline qu'elle dit être sa fille, en attendant d'avoir le courage de
l'aborder, lui dire la vérité.
Quelques jours proches du bonheur pour la nouvelle "tante" et Marie. Le vieux militaire qui héberge un temps Marie l'orpheline avec cette tante peu aimante, leur permet de faire un peu connaissance, de vivre à l'abri. Paris est occupée.
Marie 11 ans, est une enfant calme, secrète, habile, qui sait regarder le monde, entre culot et débrouillardise, elle fait tout pour sa survie, celle de sa tante. La vie dans un dispensaire proche de Reims, n'est pas facile. Anne-Angèle reste accrochée à ses souvenirs d'un amour disparu à Casablanca, la maladie la ronge. Marie possède une capacité d'adaptation rapide, intelligente, astucieuse, elle va prendre les choses en mains pour leur survie à toutes les deux, dans cette France rurale occupée où tout le monde se méfie.
Lorsque
Toinette entre dans leur vie, une fois de plus Marie va espérer. Porter
assistance à Toinette et Matesson, pour la garde de bébé Gaston, pourrait lui
permettre de manger à sa faim. Matesson, garde forestier, mari de Toinette, lui apprendra
à aimer la nature, à se cacher. Marie va s'accrocher à cette famille
improbable. L'occupation, les privations vont également la rapprocher d'Hans,
le cuistot du camp allemand. Encore une fois elle va se débrouiller, devenir l'enfant-mouche.
S'étonner de la bonne humeur que son petit spectacle va produire. Pour se
rendre compte finalement qu'Hans ne la considère ni comme une petite soeur, ni
comme un animal de compagnie, ce qui lui permettrait d'obtenir l'affection tant
attendue.
Philippe
Pollet-Villard livre un roman rude, avec une pointe d'humour noir. Raconte un monde
où la peur vous colle des cheveux blancs. Très vite, le lecteur se sent captif
du récit cruel de la vie de cette enfant, qui doit s'adapter aux circonstances,
prendre de grandes responsabilités, faire face à la bassesse humaine, à
l'égoïsme de la période. Inspiré des récits de la guerre qu'avait vécus sa
mère, l'auteur a créé Marie. Entre résistants et occupants, Marie est touchante
avec ses astuces pour trouver de la douceur au coeur de ce monde d'adultes peu
enclin à l'aimer. Il lui faut simplement trouver le moyen de vivre.
L’auteur a créé des
héroïnes : Toinette, Anne-Angèle, libres dans un monde qui ne l'est pas ;
elles ont choisi de prendre leur destinée en mains. Un
roman addictif, inclassable, habile. L'histoire déroulée avec
une certaine pudeur ne laisse pas indemne, les mots frappent.
Je tiens à remercier Babelio et son Masse Critique pour la découverte de la plume de Philippe Pollet-Villard.
Je ne me sens pas orpheline de Marie, tant j'espère découvrir sa sortie de l'enfer, la femme qu'elle va devenir.
Ma B.O. du roman :
"Prendre un enfant par la main" Yves Duteil
Très bel article pour un livre que j'avais adoré.
RépondreSupprimerPoignant et en même temps l'auteur rend un très bel hommage à sa maman.